Restauration numérique et DCP du long métrage « Les habitants » d’Alex Van Warmerdam

17 décembre 2012. Publié par Benoît Labourdette.
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La société ED Distribution a ressorti en salles le 26 décembre 2012 « Les habitants », film hollandais d’Alex Van Warmerdam (1992), pour le vingtième anniversaire de sa réalisation.

J’ai pris en charge la restauration du master numérique et la fabrication du DCP de ce film. Retour d’expérience :

La restauration des images

  • C’est un film tourné en 35mm, qui a été « scanné » (reporté en numérique) de façon rapide... le master numérique étant inexploitable en tant que tel (deux laboratoires avaient précédemment essayé d’en fabriquer un DCP, sans succès, la qualité de l’image sur l’écran de cinéma étant déplorable).
  • Le master numérique que nous avons pris en charge avait plusieurs défauts techniques :
  • Voile blanc sur l’image.
  • En même temps, images trop sombres.
  • Forte dominante verte.
  • Léger flou.
  • Fort grain.
  • Mais, « derrière » ces défauts, le film était techniquement là, et récupérable par des opérations de restauration numérique.
  • Il y avait un premier défaut, qui fut rédhibitoire pour les autres laboratoires, de conversion d’espaces colorimétrique (un peu long à expliquer...) qui produisait le voile blanc. Facile à régler.

Image d’origine (avec voile blanc) :

JPEG - 794.6 kio

Et son histogramme :

JPEG - 23.4 kio

Voile blanc supprimé :

JPEG - 816.2 kio

Et son histogramme :

JPEG - 23 kio

  • Et ensuite, on pouvait découvrir l’image originale, très granuleuse, manquant de dynamique et avec une dominante verte.

Les corrections furent donc au niveau de l’étalonnage, du gamma (courbe de contraste de l’image) et du « nettoyage » du grain de l’image et de sa netteté. Ce qui a donné ceci :

JPEG - 786.6 kio

Et l’histogramme :

JPEG - 22.2 kio

On constate, que ce soit visuellement ou à l’histogramme, que l’image a été reconstituée dans sa « plage dynamique » originelle.

Après cette opération, qui nous a montré qu’il était possible de « récupérer » le film, nous avons regardé la copie 35mm originale, en projection de bonne qualité, afin d’avoir un vrai référent. Forts de cette référence, nous avons continué à travailler l’étalonnage, afin d’approcher au plus proche de l’original, et nous avons aussi beaucoup travaillé à un nettoyage plus précis du grain de l’image (car la copie 35mm n’était pas du tout granuleuse).

En résumé, en prenant un autre plan du film, le master numérique que nous avions récupéré initialement était ainsi :

JPEG - 605.6 kio

Et, après toutes les étapes de notre traitement, au regard et dans le respect de la copie 35mm originale, il est devenu ainsi :

JPEG - 826.3 kio

Les images du film sont « ressuscitées » en salle de cinéma.

L’adaptation du son

Le son du film original était mixé en Dolby stéréo. On récupère deux pistes stéréo, que, habituellement, on place dans les enceintes gauche et droite de la salle. Concrètement, cette opération, qui semble évidente, détruit complètement la perception sonore d’origine du film. Le son n’occupe plus du tout l’espace sonore de la salle, mais semble « écrasé au fond », sans aucunes basses, et, si l’on n’est pas assis parfaitement au centre, semble ne sortir que d’un seul côté.

Nous avons produit ce que l’on appelle un « remappage » des pistes son, afin de lui redonner son espace, son déploiement dans la salle, ses graves, bref, de le reconstituer tel qu’il doit être.

C’est une opération à laquelle, malheureusement, peu de personnes pensent, le plus souvent... alors qu’elle est essentielle. Car l’espace sonore d’une salle de cinéma n’est pas, du tout, le même que l’espace sonore d’une diffusion stéréo. Diffuser un simple son stéréo sans « remappage » dans l’espace sonore multicanal du cinéma produit un effet désastreux.

Et par ailleurs, nous avons aussi nettoyé des « cracks » dûs à l’usure de la piste sonore optique originale.

Conclusion sur la restauration

A partir d’un master numérique à priori inexploitable, nous avons pu retrouver le film, dans ses qualités intrinsèques d’origine. Il a fallu pour cela un travail attentif d’investigation, qui a rendu possible l’exploitation de ce film dans toutes ses qualités, sans les coûts très importants qu’aurait représenté un nouveau scan d’une copie 35mm (tout refaire du début...).

Fabrication du DCP

Lorsque le film a eu retrouvé toutes ses qualités, la fabrication du DCP sous-titré (Digital Cinema Package - copie numérique des films pour les salles de cinéma) a été faite dans les règles de l’art, afin qu’il n’y ait aucun problème de compatibilité avec les serveurs des salles de cinéma. La conformité technique est vérifiée dans les moindres détails.

Livraison du DCP

Le DCP est livré sur un disque dur résistant aux chutes de 1,20m (LaCie Rugged Mini) dans une valise Pelican étanche et garantie à vie... afin de résister à tous les transports et manipulations !

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